Le chemin de sans retour aux pavés d'écailles et aux fleurs de plumes
1. Prologue
Musique : Deadwood ; Really Slow Motion
Deux identiques personnages s’observent. Aucun n’émet le moindre mouvement durant de longs instants. Puis l’un lève la main. Immédiatement imité par le second, comme une copie de lui-même. L’un passe sa main dans ses cheveux. L’autre soulève son propre bras avec autant de lenteur que le premier.
Puis l’individu attrape sa chevelure, d’une poigne agressive qui doit sûrement lui faire monter les larmes aux yeux. Mais tout ce qu’il voit dans son reflet, c’est la haine pure de son propre regard, la défection de sa propre existence, la froideur de ses pupilles fendues en une si parfaite symétrie qui ne lui renvoient qu’un dédain glacial dans l’ambiance tamisée de sa salle de bain aux allures bon marché.
La lampe faiblarde s’éteint tout doucement, faisant disparaître les ombres dans les ténèbres grandissantes de la pénombre, et il attend le moment où il ne verra plus rien. Il attend. Il attend le moment de se défouler contre le verre déjà fendillé, le moment où plus aucun regard méprisant ne lui percera l’âme. Enfin, le miroir s’efface et, sans prévenir il se jette contre son propre reflet désormais disparu, comme un combat qu’il mènerait contre lui-même.
Plus loin encore, à une date qui n’est pour l’instant connue de quiconque, une personne s’avance dans cette histoire. Elle n’arrive pas d’une manière calme, non, bien au contraire ; elle déboule et court, et son épiderme s’hérisse par vagues, une sensation de froid et de chaud parcourt ses membres tremblants de fatigue.
Et pourtant cette personne cavale, et vole presque, piétine le sol et se fiche d’être discrète. La panique, la peur, une lourde pression montent en elle et pourraient bien l’engloutir. Et pourtant la voilà, sa porte de sortie, l’endroit où elle pourra déverser sa terreur, où le naturel reprendra le dessus. Elle ne s’arrête même pas le temps d’ouvrir les portes, elle les pousse à la volée, et s’arrête au centre de l’endroit qu’elle cherchait à atteindre.
Un vent frais lui parcourt soudain le corps, et les gouttes de sueur qu’elle porte à même sa peau la font frémir. Les frissons reprennent, et ses poils désormais hérissés augmentent de volume, des pattes lui poussent rapidement, étirant ses muscles et ses os dans de douloureux claquements. Presque dépassée, la personne tombe à genoux, et une fois recouverte d’une couche noire et brillante, ses frissons cessent, sa respiration s’apaise, et le calme qui lui échappait lors de sa course lui revient petit à petit, à chacune des bouffées d’air qu’elle inspire.
De loin, un regard scrutateur l’observe depuis son entrée fracassante dans la grande pièce mal isolée. Il la regarde, analyse et enregistre l’action qui s’est déroulée juste sous ses yeux. Un sourire mauvais étire ses lèvres. Après quelques secondes durant lesquelles l’individu savoure son sentiment de triomphe, il finit par se décider à quitter l’ombre dans laquelle il était plongé pour faire face à ce qu’il considère désormais comme son nouvel adversaire.
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